CINÉLOO : IMPRESSIONS ET MOUVEMENTS

La musique du Collectif Loo se mêle aux images des cinéastes du début du XXe siècle. C’est aussi l’aboutissement d’un travail initié par Rémi Fox et commencé en 2011, autour de la mise en musique de films muets, d’Ernst Lubitsch et de Victor Sjöström notamment.

 

Composer ou improviser de la musique pour l’image est un défi qui soulève de nombreuses questions. Rémi Fox et le Collectif Loo abordent ce problème de diverses manières. Le choix premier pour eux était de créer une musique qui leur soit propre. Pour ce faire, ils ont cherché des images en adéquation avec leurs appétences esthétiques. Les films sont assez peu narratifs, mis à part certains de Georges Méliès. Rémi Fox a sélectionné les images pour leurs textures et pour l’ambiance qui s’en dégage. À travers ce projet, il a souhaité mettre à l’honneur la modernité de ces pionniers du cinéma, en l’habillant de la modernité musicale et sonore du Collectif Loo.

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La collaboration imaginaire entre improvisateurs d’aujourd’hui et cinéastes d’hier que propose CinéLoo renouvelle le rapport entre la musique et l’image à travers un travail sur la texture, qu’elle soit visuelle ou sonore. Ce projet jette un nouveau regard sur la notion d’improvisation, en tissant de nouveaux liens entre le cinéma et le son qui s’y rattache, et en questionnant les relations entre ces deux arts.

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La musique du Collectif Loo est intimement liée à une recherche sonore qui souhaite renouveler et réinterpréter les langages multiples du jazz et des musiques improvisées. Au long de l’enregistrement, on assiste parfois à des résurgences d’un langage de jazz plus traditionnel, en référence au début du siècle passé. En dépit de cela, c’est le langage résolument moderne du Collectif qui domine CinéLoo.Parmi leurs influences, Rémi Fox cite volontiers le saxophoniste Tim Berne, ainsi que le guitariste Marc Ducret, en soulignant leur travail sur la texture sonore. Plus généralement, le Collectif puise son langage dans diverses musiques improvisées utilisant des sonorités propres à la musique électronique contemporaine, ainsi que dans le free jazz et le rock. Pour définir leur musique, Rémi Fox utilise les termes « densité », « saturation », ou encore « texture », qui peuvent tout autant être employés pour décrire les images de ce disque. La composition est profondément marquée par le langage de l’improvisateur, à un tel point qu’il est parfois impossible de repérer où s’arrête l’écrit et où commence l’improvisation. CinéLoo est composé à parts égales de musique écrite et improvisée.

En regard des courts-métrages centenaires d’Auguste et Louis Lumière, de Georges Méliès, de segundo de Chomón, d’Émile Cohl et d’Étienne-Jules Marey sont placés ceux de l’illustratrice et réalisatrice Camille Alméras. Ces dix mini-films, commandés et créés pour ce projet, ponctuent l’enregistrement en fournissant aux musiciens un support qui permet à chacun de se présenter à travers des improvisations individuelles. Camille Alméras s’est penchée à plusieurs reprises sur le rapport existant entre le son et l’image, tout en s’appropriant divers médias (encre, sable et végétaux sur multiplane).

Vivement intéressée par la proposition de Rémi Fox de travailler sur un projet alliant sa musique aux films de « grands maîtres du début du cinéma », Camille Alméras décrit sa fascination pour ce cinéma « qui a son rythme très spécifique, une texture d’image […] vivante et qui, par son âge, est sublime et [l]’émeut » : « Ce qui me plaît dans ces films, c’est le jeu de l’acteur de l’époque, [notamment] chez Chomón et Méliès, et la composition de l’image : les noirs, les gris. Pour ce projet précis, je me suis inspirée de compositions et de cadrages de certains films de Louis Lumière. J’ai utilisé à nouveau l’encre de Chine. sa richesse de textures per- met beaucoup de variations dans les mouvements, et les végétaux apportent encore une autre dimension. »

Camille Alméras a relevé un défi en travaillant à contresens de ses habitudes : au lieu de réaliser un film d’après une musique, elle a cherché à créer une image riche en potentialités sonores. « C’était réellement donner la possibilité du son par l’animation, par le mouvement. J’ai eu le sentiment de revenir à l’une des origines de l’animation, à sa nature : le mouvement expressif, le mouvement qui éveille une émotion. » Afin d’atteindre ce but, Camille Alméras a employé le même moyen qu’utilisent les musiciens du Collectif Loo : l’improvisation. À travers la spontanéité du geste, elle a créé une trame qui, tel un chef d’orchestre, guide les musiciens dans leurs improvisations individuelles. C’est une réinterprétation du concept de « sound painting » que proposent donc l’association entre Camille Alméras et les musiciens du Collectif.

texte réalisé d’après des propos de Rémi Fox et Camille Alméras, par Georges Ledoux-Lanvin

 icon-envelope-o Rémi Fox_saxophones soprano, alto et baryton
Thomas Letellier_saxophones soprano et ténor
Esteban Pinto-Gondim_saxophones alto et baryton, clarinette
Nicolas Fox_batterie, percussion et pads électroniques
Matthieu Naulleau_piano, objets et Fx
Aloïs Benoit_euphonium et trombone
Romain Lay_vibraphone, objets et Fx
Valérian Langlais_ingénieur du son
Camille Alméras_création de films d’animation
guests : Alexandros Markeas_piano préparé, Élie Martin-Charrière_batterie et percussion